jeudi 21 mai 2009

Jack Jones, un crooner bon chic bon genre






« Love, exciting and new, come aboard, we’re expecting you ». Tel est le mémorable générique d’une pitoyable mais non moins célèbre série télé (la croisière s'amuse) dont le principal intérêt était de donner l'occasion à beaucoup d’ex-stars de l’écran de faire un dernier coucou à la caméra. L’interprète de cette scie disco était le grand crooner Jack Jones, qui a quand même enregistré des morceaux de meilleure qualité lors de sa longue carrière.

Jack Jones est le fils d’Allan Jones (célèbre chanteur d’opérette et vedette de comédies musicales qui a beaucoup joué dans les années 30 et 40, notamment avec les Marx brothers (une nuit à l’opéra) et Abbott et Costello) et d’Irene Hervey (élégante et très belle comédienne des années 30). Il est né en 1938 la nuit même où son père enregistrait le plus grand succès de sa carrière « the donkey serenade » de l’espionne de Castille (un excellent film au demeurant) avec Jeanette Mac Donald.
Avec de tels antécédents, on pouvait s’attendre à une carrière dans le show business pour le jeune garçon. Après le divorce de ses parents, et des études à l’université, Jack s’engage en effet dans une carrière de chanteur. Mais plutôt que les airs d’opérette qu’affectionnait son père, Jack marque une nette préférence pour un répertoire jazzy et swing.
En 1959, il obtient un premier rôle dans une comédie musicale de série B « Juke box rythmn », plutôt bien ficelée et agréable à voir et à entendre (il interprète 4 chansons) même si l’intrigue (une princesse se rend aux USA pour renouveler sa garde robe) n’a rien de bien transcendant !

Le déclin du genre musical à Hollywood ne laissera guère de chances à Jack de poursuivre dans cette voie. Il devient en revanche une très populaire vedette de la chanson avec des balades un peu machistes comme lollipops and roses ou wives and lovers (un numéro up-tempo composé par Burt Bacharach tiré du film le divan de l’infidélité). Toujours impeccablement coiffé et propre sur lui, en smoking et nœud papillon, Jack égraine ses succès au Ed Sullivan show ou dans le spectacles TV de Judy Garland. Dans l’un d’eux, ressorti en DVD, les 2 artistes nous offrent un hommage à Nelson Eddy et Jeanette Mac Donald, avec un petit coup de chapeau au papa de Jack. Si le phrasé du chanteur est très bien mis en valeur sur les titres qui balancent vraiment, ses versions trop lénifiantes de stranger in the night et autres d’autres slows sont plus contestables (à moins d’avoir un fort goût pour le easy listening).

Outre la version anglaise de « vivre pour vivre » du Francis Lai, le plus mémorable succès de Jack reste probablement « the quest (impossible dream) » du musical l’homme de la mancha qu'il sera le premier à enregistrer (même si beaucoup de néophytes continuent de croire que Jacques Brel, qui a si bien interprété et traduit la chanson en français, en est l’auteur). Il a aussi été le premier artiste américain a enregistrer un album entier de chansons composées par Michel Legrand et orchestrées par celui-ci : c’est probablement la plus grande réussite de sa carrière.
Dans les années 70, le gentil crooner a du mal à surnager dans les incessants mouvements que connaît le monde musical. Il parvient néanmoins à placer quelques succès comme What I did for love (de Chorus Line) et reprend entre autre du Billy Joel (this is my life) sans parler générique de la croisière s’amuse (1977). Il jouera d’ailleurs dans un des épisodes de cette série imbécile, avec son papa et Dorothy Lamour. Avec humour, il acceptera de paraître dans un court passage de Y at’il un pilote dans l’avion n°2, pour chanter à nouveau un passage de ce monument de kitsch.

En revanche, on peut s’attarder un peu plus longuement sur le film d’épouvante britannique « Hallucinations » (1978) de Pete Walker, dont il est la vedette principale. Dans le rôle d’un chanteur has been essayant de faire son come-back (une situation pas très éloignée de la sienne), il livre une prestation tout à fait convaincante (même si un critique narquois le comparera à un Robert Redford de série B avec des dents de lapin).
Cadavres en état de décomposition, cottage lugubre, hurlements dans la nuit : tous les ingrédients sont là : c’est de la série B, mais le film parvient à garder l’attention du spectateur, et au second degré, ça a une certaine saveur. En outre, le réalisateur Pete Walker (qui au départ aurait voulu Brian Ferry pour le rôle) s’amuse parfois à inverser les recettes du genre. Ici, c’est Jack Jones et non pas une jolie pin-up qui sort du lit presque nu pour enfiler sa robe de chambre à chaque fois qu’il entend des choses bizarres sur les coups de 3 heures du matin !

Aujourd’hui Jack Jones poursuit sa carrière aux USA et en Grande Bretagne (où il sera en 2008, si vous voulez réserver vos places), notamment dans une reprise sur scène de l’homme de la Mancha. Le grand séducteur (son court mariage avec Jill St John a fait beaucoup parler à la fin des années 60) a depuis longtemps les cheveux blancs, mais n’a pas du tout perdu sa voix ni son talent.

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